Maître de Conférences dans le département d’anglais LLCER de l’Université Sorbonne Paris Nord où il enseigne la littérature américaine et la traduction, Frédéric Sylvanise est spécialiste de littérature et de musique. Il s’intéresse plus spécifiquement à la poésie africaine-américaine. Il a publié en 2009 un essai intitulé Langston Hughes, poète jazz, poète blues (ENS Editions) puis a publié une traduction du deuxième recueil de ce poète intitulée mes beaux habits au clou (Joca Seria, 2018). Il est accueilli cette année en délégation au Larca, plus particulièrement dans le cadre des activités de l’axe Frontières du Littéraire.
Frédéric, quels sont vos thèmes de recherche et comment ont-ils évolué ?
Angliciste de formation, je me suis très tôt intéressé à la culture africaine-américaine, notamment la littérature et la musique. Après deux années passées à New York en tant qu’étudiant, j’ai entrepris de faire une thèse de doctorat consacrée à l’œuvre poétique de Langston Hughes, sur le conseil de Michel Fabre, pionnier des études noires en France. En tant que maître de conférences à l’université Paris 13, j’ai ensuite enseigné la littérature américaine et la version et j’ai consacré un séminaire de Master aux musiques populaires américaines pendant de nombreuses années. Plus récemment, j’ai commencé à écrire une monographie sur le travail poétique de Robert Hayden (1913-1980), très méconnu en France, alors que son influence sur la poésie africaine-américaine contemporaine est considérable.
Quels aspects de vos recherches vont pouvoir s’appuyer sur cette délégation ?
Dans la continuité des recherches que je mène depuis une vingtaine d’années sur la poésie africaine-américaine et son rapport d’une part à l’histoire, à l’engagement voire au militantisme et d’autre part à la musique (en particulier les musiques noires telles que le blues, le jazz et, dans une moindre mesure, le rap), je me propose d’entreprendre un projet de recherche articulé en deux volets principaux.
Le premier porte sur l’œuvre du poète Robert Hayden (1913-1980) et plus particulièrement sur sa manière d’appréhender l’histoire et la mémoire individuelle et collective. Si le poète n’est pas un historien, il contribue malgré tout à la réécriture de l’histoire officielle du point de vue des opprimés, de manière polyphonique et en privilégiant une approche pacifiste, largement inspirée des enseignements du bahaïsme. Bien qu’elle soit essentielle pour les lettres noires du XXème siècle, cette œuvre n’a jamais fait l’objet d’un travail de monographie en France, tout en restant relativement peu étudiée aux Etats-Unis depuis la fin des années 1980.
L’autre volet de mon projet se donne pour objet le travail multiforme de l’artiste et activiste queer d’origine nigériane basée à Philadelphie, Camae Ayewa (alias Moor Mother), qui conçoit son activité poétique en relation avec les musiques contemporaines (jazz, musiques électroniques, et récemment rap), lui donnant ainsi une très forte dimension orale et scénique et démultipliant les formes de l’engagement, notamment contre les dérives de la finance, les violences faites aux femmes, les violences policières ou encore les expulsions et appelant à réparer les crimes du colonialisme et de l’impérialisme.
Quels sont vos projets de restitution à l’issue de cette année ?
Ma délégation est adossée à un projet d’HDR qui, outre la poésie de Hayden, portera sur les liens entre arts populaires et arts savants dans le domaine américain et je vous donne rendez-vous à l’automne où je présenterai mes travaux au cours d’une séance du séminaire Frontières du Littéraire.