À l’occasion du 100e anniversaire de la publication de The Waste Land, le LARCA  invite la communauté des chercheurs sur le Modernisme, et tout particulièrement les spécialistes des études élotiennes, à débattre de leur réévaluation de l’œuvre et des idées de T. S. Eliot en Europe. À cet égard, nous nous intéresserons de près, mais pas exclusivement, au rôle de la traduction dans les processus de réception et de canonisation, c’est-à-dire, dans la formation et les réaménagements des canons littéraires et leurs effets sur la circulation des théories littéraires. De même, l’examen des processus de traduction et de leurs effets sur la réception littéraire pourrait éclairer à nouveaux frais la lecture, la critique et l’enseignement d’Eliot.

D’après sa correspondance, Eliot apparaît très soucieux de voir TWL, puis l’essentiel de son œuvre, traduite en langues étrangères, constituant ainsi ce qu’on appellerait un corpus traduit. Un tel corpus pourrait être appréhendé sous plusieurs angles : comme un vecteur et une mesure de la diffusion du Modernisme en Europe ; comme un agent façonnant la perception du Modernisme dans différentes aires culturelles et linguistiques ; comme une influence sur les productions culturelles dans les langues vernaculaires ; comme l’aboutissement d’une stratégie d’auto-canonisation.

Une évaluation du corpus traduit en tant que tel pourrait également soulever d’autres questions telles que : la localisation et l’analyse des relations spatio-littéraires entre le corpus traduit en différentes langues et les voyages/séjours d’Eliot, la géographie de son corps voyageur en quelque sorte ; l’appréciation de ce que la texture des textes cibles et des écarts par rapport aux textes sources disent d’Eliot, de son œuvre et de leur critique ; l’effet de la temporalité et du temps qui passe sur le corpus traduit et en retour sur les textes sources ; l’exploration des filiations, échos et résonances poétiques et esthétiques de la production d’Eliot sur ses lecteurs en anglais ou en traduction.

Bref, ce colloque travaillera autour de la question de ce qu’on pourrait appeler les « survies traductives » de T.S. Eliot, pour reprendre le concept de fortleben comme étant l’une des tâches de la traduction (plus encore que du traducteur) selon Walter Benjamin (La tâche du traducteur, 1923).

 

Nous accueillons les contributions dans les domaines suivants :

  

Traductologie

Problèmes traductifs du Modernisme : Traduire l’illisible, traduire le multilinguisme ; la traduction comme langage et technique du Modernisme. Questions de traduction : empreinte de la traduction princeps et de l’ethos des traducteurs ; qui étaient les premiers traducteurs d’Eliot ? Pourquoi et comment ont-ils traduit son œuvre ? Quelles relations Eliot entretenait-il avec eux ? Retraduire Eliot : quelle émancipation des 2e et 3e générations de traducteurs et de leurs traductions par rapport à leurs prédécesseurs et au canon ?

 Réglementation

Poids des contraintes légales sur les traductions et la circulation/réception des œuvres ; part des contraintes légales dans la canonisation et l’édification du canon.

Canonisations et décanonisations

Eliot, facteur d’attraction ou repoussoir dans le réaménagement des canons littéraires nationaux en Europe : stratégie des acteurs (chercheurs, éditeurs, traducteurs et critiques) dans l’élévation d’un « auteur » au statut d’icône, ou dans sa relégation ; empreinte politique et institutionnelle sur la sphère littéraire et son autonomie ; politique de la traduction, politique du canon : enseigner et critiquer Eliot à l’école et à l’université hors du monde anglo-saxon ; matérialité du canon, matérialité de la traduction, stratégies d’auteurs et d’éditeurs.

Transmédialités

La réticence d’Eliot à ce que sa poésie soit traduite en d’autres formes artistiques n’a pas empêché les artistes européens de s’inspirer de ses vers pour produire de nouvelles formes et de nouveaux langages, que ce soit dans les arts visuels (Francis Bacon, Julian Peters), les performances (Benjamin Britten, Pam Tanowitz, Pippo Delbono), le cinéma (Michael Petronie, Karl Verkade), etc. Qu’apportent ces explorations à la lecture et à la critique d’Eliot, ainsi qu’à la compréhension des mécanismes de transposition et de traduction et à leur théorie ?

 

Veuillez adresser le résumé (250 mots) pour une communication de vingt minutes et une biographie succincte à Pascale-Marie Deschamps,

pascale-marie.deschamps@etu.u-paris.fr avant le 30 avril 2022.

 

 

Comité scientifique/Scientific Committee

 Antoine Cazé, Université de Paris, LARCA

Jean-Marie Fournier, Université de Paris, LARCA

Jennifer Kilgore-Caradec, Université Caen Normandie, LARCA

Benoît Tadié, Université Rennes 2

Amélie Ducroux, Université Lumière-Lyon 2

Olivier Hercend, Université Paris Nanterre

Cécile Varry, Université de Paris, LARCA ; Oxford University

Magdalena Heydel, Jagiellonian University

Jayme Stayer, Loyola University Chicago

Fabio L. Vericat, Universidad Complutense de Madrid

 

 Bibliographie succincte/Selected References

 Traduction/Réception

BERMAN, Antoine, Pour une critique des traductions, Paris, Gallimard, 1995.

DOSSE, Mathieu (dir.) Poétique de la lecture des traductions, Classiques Garnier, 2016.

INFANTE, Ignacio, After Translation: The Transfer and Circulation of Modern Poetics

across the Atlantic, Fordham UP, 2013.

KAHN, Robert, SETH, Catriona (dir.) La retraduction, Publication des universités de Rouen et du Havre, 2010.

MORGENSTERN, John, D. « T.S. Eliot and Modernist Translation, 1920 to Early Twenty-First Century Modern Poetry », John Wiley & Sons, 2019, https://doi.org/10.1002/9781118635193.ctwl0266.

SAMOYAULT, Tiphaine, Traduction et violence, Seuil, 2020.

TADIÉ, Benoît, « T. S. Eliot, La Terre dévastée (The Waste Land), présentation et traduction de Benoît Tadié », Po&sie, 2020/4 (n° 174), https://www.cairn.info/ revue-poesie-2020-4-page-119.htm

THOMAS, Chloé et TADIÉ Benoît, « Retraduire The Waste Land », Transatlantica, 1|2021, https://doi.org/10.4000/transatlantica.16879

VINCLAIR, Pierre, Terre inculte, Penser dans lillisible, Hermann, 2018.

 

Canon/réception

CASANOVA, Pascale, La République mondiale des lettres, Paris, Seuil, 1999.

DÄUMER, Elisabeth, BAGCHEE, Shyamal (dir.) The International Reception of T. S. Eliot, Bloomsbury, 2007.

DI MANNO, Yves, GARRON, Isabelle (dir.) Un nouveau monde, poésie en France, 1960-2010. Un passage anthologique, Flammarion, 2017.

DUCROUX, Amélie, La Relation et l’absolu, lecture de la poésie d’Eliot, PUPS, 2014.

_____ « The Feeling of Thought : T. S. Eliot’s Programmatic Poetry », Transatlantica,

2014.

HERCEND, Olivier, « Le rapport au lecteur dans les textes de T.S. Eliot, Virginia Woolf et James Joyce », thèse de doctorat, 2019.

GIOCANTI, Stéphane, T. S. Eliot ou le monde en poussière, JC Lattès, 2002.

LANG, Abigail, La Conversation transatlantique : les échanges franco-américains en

poésie depuis 1968, Presses du Réel, 2020.

LOJKINE-MORELEC, Monique, T. S. Eliot : Essai sur la genèse d’une écriture, Klincksieck/Publications de la Sorbonne, 1985.

MARX, William, Naissance de la critique moderne : la littérature selon Eliot et Valéry,

Artois Presse Université, 2002.

PERLOFF, Marjorie, « Can(n)on to the Right of Us, Can(n)on to the Left of Us », in Poetic License: Essays on Modernist and Postmodernist Lyric, Evanston, Northwestern UP, 1990.

_____ 21st-Century Modernism, The « New » Poetics, Black-well Publishers, 2002.

NESME, Axel, « Canonical Agon in Post World-War II American Poetry Anthologies », dans Revue française d’études américaines, « Qui a peur des nouveaux canons ? », n°110, Belin, décembre 2006, pp. 42-60.

ROSAYE, Jean-Paul, T.S. Eliot, poète-philosophe : Essai de typologie génétique, Presses Universitaires du Septentrion, 2000.

STAYER, Jayme (dir.) T. S. Eliot, France, and the Mind of Europe, Newcastle upon Tyne, UK, Cambridge Scholars, 2015.

 

Transmédialités

FREER, Scott, « Remediating ‘Prufrock’ », Arts, MDPI, octobre 2020,

https://www.mdpi.com › pdf

HUTCHEON, Linda, A Theory of Adaptation, New York, Routledge, 2012 (2nd Edition).

JENKINS, Henry, Convergence Culture, Where old and new media collide, NUY Press,

2006.

MAVRAKIS, Annie, « Francis Bacon, un moderne intempestif », Polysèmes [En ligne], 17 | 2017, mis en ligne le 30 avril 2017, http://journals.openedition.org/polysemes/1881

 

Réglementation/Legal/Illegal

BENTLY, Lionel, « Copyright and the Death of the Author in Literature and Law », The

Modern Law Review, vol. 57, 1994.

GENTZLER, E. Translation and Rewriting in the Age of Post-Translation Studies, Abingdon, Routledge, 2017.

LEE, Tong King, « Translation and Copyright: toward a distributed view of originality and authorship, The Translator, vol. 26, n°3, 2020.